vendredi 23 février 2018

Les armures ça protège vraiment !

Oui je sais, j'assène des évidences avec une pédanterie insupportable, mais pourtant...
pourtant, que ne croit-on pas sur les armures, des armes qui peuvent les percer.D'ailleurs, de ce qu'on peut voir dans la majorité des films ou des spectacles vivants de combat, elles ne semblent pas vraiment servir à grand-chose...

On va donc parler ici de leur efficacité et de ce qu'on pourrait faire avec ça en escrime de spectacle.

Précision : on ne va ici évidemment parler que des armures de métal, les armures de cuir étant quand même anecdotiques dans l'Histoire et les armures matelassées moyennement efficaces et surtout portées sous une armure de métal (cf mon billet précédent).

Ci-dessous, quelques armures des XVI-XVIIèmes siècles exposées au Musée de l'Armée à Paris

Les armures sont efficaces :

On a donc, de l'Antiquité à la fin de l'époque moderne (et même au XIXème siècle avec les cuirassiers) deux grands types d'armure : les armures souples comme les cottes de mailles mais aussi les broignes d'écailles ou d'anneaux ou encore les brigandines et les armures rigides de plates d'acier voire (dans l'Antiquité) de bronze, les casques sont aussi en tôle d'acier rigide.
En fait une armure c'est solide, sinon les gens ne les porteraient pas. C'est fait pour résister à la plupart des armes courantes et c'est d'ailleurs pour cela que ça évolue. Selon les époques, les armes auxquelles il faut faire face mais aussi la richesse des combattants voire l'organisation sociale l'armure est plus ou moins complète. Le casque est la base, il protège la partie la plus sensible et, en général, si on n'a qu'une seule pièce d'armure c'est un casque. Le reste varie énormément.
Mais revenons-en à la solidité, on pense souvent qu'un coup d'épée asséné avec force pourrait percer une armure, en fait c'est faux. Même la cotte de mailles y résiste. Pour preuve les gens de ce site ont fait des tests qui semblent assez sérieux de résistance d'une cotte de mailles historique. On voit que globalement les gens du XIIIème siècle étaient bien protégés dans leurs cottes de mailles et l'on imagine aisément que les plates qui ont succédé à la cotte de mailles étaient encore plus efficaces.

Vidéo de l'un des tests réalisés par les gens de Guerre et chevalerie

On n'a pas fait le test avec des armes plus puissantes comme les haches, les becs de corbin ou les hallebardes mais, même avec ces armes redoutables, il semble qu'il faille frapper bien fort pour vraiment passer l'armure et blesser le porteur.

On peut également espérer taper tellement fort qu'on assomme le porteur à force de coups. C'est possible là encore mais pas évident quand on voit les coups que sont capables de s'envoyer les pratiquants de béhourd par exemple.


La plupart des coups seront donc tentés sur les parties non protégées, les "ouvertures" et il y en a toujours : au minimum les aisselles, l'arrière des cuisses, l'entrejambe, souvent le visage (les casques fermés sont pénibles pour combattre), le cou, et tout ce qui n'est pas protégé si l'armure n'est pas complète. En armure complète on en arrive donc à combattre de très près, avec une escrime mêlant lutte et techniques de demi-épée pour atteindre les failles de l'armure.

Extrait du Codex Wallerstein (entre 1420 et 1470) montrant des techniques de combat en armure


On rajoutera pour l’anecdote qu'au XVIIème siècle on portait encore des armures et que celles des hommes d'armes (les cavaliers armurés, descendant direct des chevaliers médiévaux) comprenaient des cuirasses à l'épreuve des coups d'arquebuse de face et de pistolet de dos.

Les armures ne devraient pas être que des costumes :

Parce que c'est quand même trop souvent ce qu'on constate : combien de figurants en cotte de mailles transpercés par un coup d'estoc sans vigueur, découpés par un coup de taille qui n'aurait dû que glisser ? Combien de combats où un héros sans armure, armé de sa seule épée, vient à bout de dizaines de guerriers en armure, les frappant comme si ils n'en avaient pas. Combien de héros ôtant leur casque sur le champ de bataille alors que c'est tout de même particulièrement suicidaire ? On ne parlera pas des grands coups à la tête sur les gens qui portent des casques...
Dans un combat chorégraphié l'armure est donc très souvent un simple costume et ne sert en général à rien dans la chorégraphie en elle-même avec laquelle elle n'a, la plupart du temps, pas de liens.

Reconnaissons que même quelques éléments d'armure médiévale soulignent très efficacement l'aspect guerrier d'un personnage ou simplement son statut de garde chair à épée... Mais pourquoi ne pas l'exploiter dans la chorégraphie elle-même plutôt que d'en arriver à des aberrations comme un gentil coup de taille d'épée abattant un gaillard casqué et armé d'acier ? Au minimum s'arranger pour que la mise à mort soit crédible. Plus loin, faire comprendre au spectateur que le gars est protégé (pourquoi pas frapper la zone armurée ? Ça fait un joli bruit en plus !).

Le pur combat en armure de plates pourrait être quelquechose d'original, brutal et intense mêlant coups brutaux pour déconcentrer, demi-épée et lutte. Pour que cela soit spectaculaire il faudrait probablement quelques passes de lutte avec projections ou renversement ce qui peut être dangereux et réserver l'exercice à des professionnels ou des amateurs très au point mais pourquoi ne pas tenter ? En vidéo, avec la possibilité de filmer de près, les phases de demi-épée pourraient être très fortes. Je ne crois jamais avoir vu ça quelque part et c'est dommage...

Ah oui, une dernière chose : messieurs les réalisateurs de cinéma : mettez des casques à vos acteurs, des casques avec plumes ou décorations pour bien les reconnaître, mais aussi permettre à des cascadeurs de les remplacer et d'offrir de meilleurs combats aux spectateurs !

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